LE CONTRAT DE TRAVAIL A DUREE DETERMINEE
(par Gwendoline AUBOURG)

La loi de modernisation sociale n°2002-73 du 17 janvier 2002 a pour objet de renforcer la protection de tous les salariés et notamment, celle des salariés en contrat de travail à durée déterminée (mais aussi celle des salariés en intérim!). Le renforcement de cette protection implique de nombreux changements dans la réglementation applicable aux CDD :

- limitation des cas de recours à l'emploi précaire
- possibilité de rompre le CDD avant son terme,
- augmentation de la prime de précarité,
- durée de préavis limitée en cas de proposition de CDI,
- renforcement du rôle du comité d'entreprise,
- etc...

1. LE RECOURS AU CDD

Les cas de recours autorisés
Les interdictions de recourir au CDD
Le renforcement du rôle du comité d'entreprise

2. LE CONTENU DU CDD

La rédaction du contrat de travail
Les mentions obligatoires
Mentions facultatives

3. LA DUREE DU CDD

CDD comportant un terme précis
CDD ne comportant pas de terme précis
Renouvellement du CDD

4. LES DROITS DES SALARIES EN CDD

Les droits individuels
Les droits collectifs

5. LA SUCCESSION DE CDD

Succession de CDD sur le même poste de travail
Succession de CDD avec le même salarié

6. LE FIN DU CDD

La fin du CDD à l’échéance fixée
La rupture anticipée du CDD
Les formalités liées à la fin du CDD
La poursuite du travail au-delà de l’échéance fixée


1/ LE RECOURS AU CDD

Les cas de recours autorisés
Le CDD, quel que soit le motif, ne peut avoir ni pour objet, ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise (C. trav., art. L. 122-1).

La loi prévoit trois cas de recours au CDD :

Le remplacement d’un salarié absent
Trois situations sont envisagées:
- Le remplacement d’un salarié temporairement absent pour cause de congés payés, congés pour événements familiaux, maladie, maternité, accident du travail, congé parental d’éducation, congé de formation, etc.
- Le remplacement d'un salarié qui a quitté définitivement l'entreprise avant la suppression de son poste. La suppression du poste doit intervenir dans les 24 mois au maximum. Le comité d’entreprise (ou, à défaut des délégués du personnel) doit être consulté avant la mise en œuvre de ce cas de recours.
- Le remplacement d’un salarié recruté en CDI pour occuper le poste dans l'attente de son entrée effective dans l'entreprise.

L’accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise
L'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise peut être dû à l'une des causes suivantes :
- Une commande exceptionnelle à l’exportation nécessitant des moyens plus importants que les moyens habituels de l’entreprise. Il est nécessaire de consulter préalablement le comité d’entreprise ou, à défaut les délégués du personnel.
- L’exécution d’une tâche occasionnelle précisément définie et ponctuelle qui ne relève pas de l’activité habituelle de l’entreprise (par exemple, l’informatisation d’un service)
- L’exécution de travaux urgents nécessaires pour prévenir des accidents imminents, réparer du matériel, des installations ou des bâtiments présentant un danger pour les personnes, organiser des mesures de sauvetage

Les travaux temporaires par nature
Il existe trois catégories de travaux temporaires par nature:
- Les emplois à caractère saisonnier: Les emplois saisonniers sont ceux pourvus dans le cadre de travaux appelés à se répéter chaque année à des dates à peu près fixes, en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectifs.
- Les emplois pour lesquels il est d’usage de recourir au CDD: Dans un certains nombre d’activités mentionnées par la loi (C. trav., art. D. 121-2), il est d’usage constant de recourir à des salarié sous CDD pour pouvoir des emplois pour lesquels il est d’usage constant de ne pas conclure un CDI en raison de la nature de l’activité exercée ou du caractère temporaire de ces emplois. Les secteurs concernés sont notamment : hôtellerie, exploitation forestière, spectacle et action culturelle, audiovisuel, bâtiment et travaux publics pour les chantiers à l’étranger, production cinématographique, activités d’enquête et de sondage, etc.
- L’embauche dans le cadre de la politique de l’emploi: Sont notamment concernés les contrats de qualification, d’adaptation, de qualification, les contrats initiative-emploi, les contrats emploi-consolidé, etc. Il en est de même lorsque l’employeur s’engage à assurer un complément de formation professionnelle à certaines catégorie de salariés. Par exemple, pour les élèves ou les anciens élèves d’un établissement d’enseignement effectuant un stage d’application.

Les interdictions de recourir au CDD
L’employeur ne peut pas recruter un salarié en CDD :
- pour remplacer un salarié absent par suite d’un conflit collectif
- pour occuper un poste précédemment pourvu par un salarié en CDD ou en contrat de travail temporaire
- pour effectuer des travaux particulièrement dangereux définis par arrêté ministériel et faisant l’objet d’une surveillance spéciale par les médecins du travail (sauf dérogation accordée par la DDTEFP)
- lorsqu’il a procédé à un licenciement économique dans les six mois précédents. Cette interdiction s’applique au CDD conclu pour un motif d’accroissement temporaire d’activité, y compris pour l’exécution d’une tâche occasionnelle mais non pour les autres motifs comme le remplacement d’un salarié absent. Par ailleurs, cette interdiction s’applique uniquement au poste concerné par le licenciement. Toutefois, l’employeur peut avoir recours au CDD si sa durée ne dépasse pas trois mois non renouvelables ou s’il s’agit d’une commande exceptionnelle à l’exportation nécessitant des moyens inhabituels.

Le renforcement du rôle du comité d'entreprise
Le comité d'entreprise peut décider de saisir l'inspecteur du travail afin que celui-ci effectue les constatations qu'il estime utiles dans deux situations:
- lorsqu'il a connaissance de faits susceptibles de caractériser un recours abusif aux CDD (et même aux contrats de travail temporaires);
- ou, lorsqu'il constate un accroissement important du nombre de salariés occupés dans l'entreprise sous CDD (et sous contrat de travail temporaire).

L'inspecteur du travail peut alors adresser un rapport à l'employeur retraçant ses constatations. L'employeur doit ensuite communiquer ce rapport au comité d'entreprise (ou aux délégués du personnel) en même temps que sa réponse motivée aux constatations de l'inspecteur du travail. Cette réponse doit préciser les moyens qu'il met en œuvre dans le cadre d'un plan de résorption de la précarité destiné à limiter le recours à ces formes de contrat de travail (C. trav., art. L. 432-4-1).

2/ LE CONTENU DU CDD

La rédaction du contrat de travail
Le CDD doit faire l'objet d'un écrit sur papier libre, établi en deux exemplaires. Un des exemplaires doit être remis au salarié dans les deux jours suivants l'embauche.

Attention: En l'absence d'écrit ou de signature du salarié, le contrat est présumé avoir été conclu pour une durée indéterminée. Cette présomption de CDI est irréfragable.

Les mentions obligatoires

Le CDD doit obligatoirement mentionner :
- la définition précise du motif pour lequel il est conclu;
- le nom et la qualification du salarié remplacé lorsque le contrat est conclu pour remplacer un salarié temporairement absent;
- la date d'échéance du terme lorsque le contrat comporte un terme précis;
- une durée minimale lorsque le contrat est conclu sans terme précis;
- la désignation du poste de travail;
- l'intitulé de la convention collective applicable;
- le montant de la rémunération et ses différentes composantes;
- le nom et l'adresse de la caisse de retraite complémentaire.

Attention: L'absence de certaines de ces mentions peut entraîner la requalification du CDD en CDI (sauf mention relative à la convention collective applicable et mention relative au nom et adresse de l'organisme de retraite complémentaire).

Mentions facultatives

Bien que facultatives, le CDD comporte dans la plupart des cas une ou plusieurs des mentions suivantes:
- Clause relative à la période d'essai: La période d'essai n'est pas obligatoire. Si elle est prévue, elle ne peut excéder un jour par semaine dans la limite de deux semaines lorsque la durée initialement prévue au contrat est au plus égale à six mois et un mois dans les autres cas (sauf usage ou dispositions conventionnelles prévoyant des durées moindres);
- Clause de renouvellement;
- Coordonnées d'un organisme de prévoyance.

3/ LA DUREE DU CDD

CDD comportant un terme précis
Durée minimale
Aucune durée minimale n’est fixée par la loi. Ainsi, le CDD peut être conclu pour une semaine ou encore, une seule journée.
Durée maximale
La durée maximale varie en fonction du motif de recours au CDD:
- 18 mois maximum, renouvellement compris pour les CDD conclu pour l’exécution d’une tâche précise;
- 24 mois maximum, renouvellement compris pour les CDD conclus à l’étranger, en cas de départ définitif d’un salarié précédant la disparition du poste, en cas de commande exceptionnelle à l’exportation;
- 9 mois maximum, renouvellement compris pour les CDD conclu dans l’attente de l’entrée en service d’un salarié recruté en CDI, en cas de travaux urgents pour des raisons de sécurité.

Important: La durée des CDD conclus dans le cadre de la politique de l’emploi est fixée par les textes juridiques régissant ces contrats.

CDD ne comportant pas de terme précis
Durée minimale
Le CDD doit être conclu pour une durée minimale fixée à l’avance. Cette durée varie en fonction de la nature des tâches devant être accomplies par le salarié recruté en CDD.
Durée maximale
Aucune durée maximale n’est fixée par la loi. Le terme du contrat survient lorsque le motif pour lequel le CDD a été conclu se termine. Par exemple : le retour du salarié remplacé, la réalisation de l’objet du contrat, la fin de la saison, etc.

Renouvellement du CDD
Le CDD peut être renouvelé une fois pour une durée déterminée. La durée totale du CDD, renouvellement inclus, ne doit pas dépasse les durées maximales énoncées ci-dessus. Les conditions du renouvellement doivent être prévues dans le contrat de travail initial ou faire l’objet d’un avenant avant le terme de celui-ci.

4/ LES DROITS DES SALARIES EN CDD

Les droits individuels
La rémunération
La rémunération du salarié en CDD doit être au moins égale à celle que percevrait, après période d'essai, un autre salarié de l'entreprise de qualification équivalente et occupant le même poste de travail.

Les congés payés
Le salarié sous CDD acquiert des droits à congés payés et peut les prendre selon les mêmes modalités qu'un salarié sous CDI. Cependant, s'il ne prend pas ses congés, le salarié sous CDD perçoit une indemnité compensatrice de congés payés, lors de la rupture ou de la fin du contrat, même si la durée du contrat est inférieure à un mois de travail effectif. Ainsi, un salarié dont le CDD est rompu pendant la période d'essai doit percevoir une indemnité compensatrice de congés payés au prorata de la durée de travail effectivement accomplie, et ce dès la première heure travaillée. Par ailleurs, si l'entreprise ferme pendant le congé et que le salarié sous CDD n'a pas acquis un droit de congé correspondant à la durée de la fermeture, il peut prétendre à des allocations de chômage partiel-congés payés.

Les droits collectifs
Sous réserve des conditions d'ancienneté requises pour chacune des élections professionnelles, les salariés en CDD sont électeurs et éligibles aux élections des délégués du personnel et des membres du comité d'entreprise.
Ils peuvent également être désignés comme délégués syndicaux. Pour exercer leur mandat de représentation, ils bénéficient des mêmes droits que les autres salariés.
Par ailleurs, pour la mise en place de ces élections, ils sont comptabilisés dans les effectifs au prorata de leur temps de présence, sauf lorsqu'ils remplacent un salarié absent (puisque ce dernier est déjà comptabilisé).

A noter: Par ailleurs, l'employeur a désormais l'obligation de porter à la connaissance des salariés liés par un CDD la liste des postes en CDI à pourvoir dans l'entreprise lorsqu'un tel dispositif existe déjà dans l'entreprise pour les salariés liés par un CDI (C. trav., art. L. 122-3-17-1).

5/ LA SUCCESSION DE CDD

Succession de CDD sur le même poste de travail
A la fin d’un CDD, l'employeur doit respecter un délai minimal avant de recourir à un nouveau CDD (ou à un contrat de travail temporaire) sur le même poste de travail.
Ce délai minimal est égal:
- au tiers de la durée du CDD qui vient de s’achever, renouvellement inclus si la durée de ce contrat, renouvellement inclus est au moins égal à 14 jours;
- à une période égale à la moitié de la durée du contrat, renouvellement inclus, si la durée de ce contrat, renouvellement inclus est inférieur à 14 jours (C. trav., art. L. 122-3-11).

Désormais, ce délai de carence est calculé en jours ouvrables (avant, il était calculé en jours calendaires). Seuls sont donc comptabilisés les jours d'ouverture de l'entreprise ou de l'établissement concerné (C. trav., art. L. 122-3-11).

Attention: Dans certains cas, le délai de carence ne doit pas être respecté:
- en cas de nouvelle absence du salarié remplacé;
- en cas d’emploi pour lequel il est d’usage constant de recourir au CDD;
- pour accomplir des travaux urgents nécessaire pour des raisons de sécurité;
- en cas de contrats conclu dans le cadre de la politique de l’emploi;
- en cas de rupture anticipée du CDD du fait du salarié;
- en cas de refus du salarié de renouveler son contrat.

Succession de CDD avec le même salarié
L'employeur a la possibilité de conclure plusieurs CDD avec le même salarié sans que le contrat ne se transforme en CDI dans les cas suivants :
- remplacement de salariés absents
- emplois à caractère saisonnier
- emploi d’usage
- contrat de qualification

Dans tous les autres cas de recours, si l'employeur souhaite conclure plusieurs CDD avec le même salarié, il doit respecter un délai minimal. Ce délai minimal n’est pas précisément défini par la loi. Toutefois, il faut savoir que s'il est trop bref, le conseil de prud’hommes peut requalifier le CDD en CDI.

Important: Si l'employeur souhaite conclure plusieurs CDD sur le même poste de travail avec le même salarié, ce sont les règles de succession sur le même poste de travail qui s'appliquent.

6/ LA FIN DU CDD

La fin du CDD à l’échéance fixée
Si le CDD comporte un terme fixe, il prend automatiquement fin à cette échéance.
Si le CDD comporte une durée minimale, il prend fin dès que l’objet pour lequel il a été conclu est réalisé ou encore au retour du salarié remplacé.

A noter : S’il est conclu pour remplacer un salarié absent, le CDD peut rendre fin quelques jours après le retour du salarié remplacé pour que le remplaçant mette au courant le salarié remplacé des tâches accomplies.

La rupture anticipée du CDD
La rupture anticipée du CDD est autorisée (C. trav., art. L. 122-3-8):
- en cas d’accord des parties ;
- en cas de force majeure: Rarement admise par les tribunaux, la force majeure est constituée par un événement imprévisible, insurmontable et étranger à la personne qui l’invoque.
- en cas de faute grave: Si l'employeur souhaite rompre le CDD de manière anticipée pour faute grave du salarié, il doit respecter la procédure de licenciement, c’est-à-dire convocation à un entretien préalable, entretien préalable et notification du licenciement.
- à l'initiative du salarié lorsqu'il justifie d'une embauche en CDI: Dans ce cas, sauf accord des parties, le salarié est tenu de respecter une période de préavis dont la durée est calculée:
- si le CDD comporte un terme précis: à raison d'un jour par semaine compte tenu de la durée totale du contrat (renouvellement inclus), dans la limite maximale de deux semaines ;
- si le CDD ne comporte pas de terme précis: à raison d'un jour par semaine compte tenu de la durée de travail déjà effectuée dans la limite maximale de deux semaine.

A noter : La déclaration d'inaptitude par le médecin du travail ne constitue pas un cas de force majeure, le caractère d'imprévisibilité faisant défaut. L'employeur ne peut donc pas procéder à la rupture anticipée du CDD en cas d'inaptitude physique du salarié. Il est contraint d'attendre la fin du terme du contrat. Toutefois, lorsque l'employeur ne peut proposer un reclassement au salarié en CDD, déclaré inapte à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, il peut demander la résolution judiciaire de son contrat (C. trav., art. L. 122-32-9).

Les formalités liées à la fin du CDD
Les formalités administratives
Si le CDD prend fin à l’échéance fixée, l'employeur ne doit accomplir aucune formalité particulière. En effet, il n'a pas l'obligation de prévenir le salarié de son intention de poursuivre ou non le contrat au-delà du terme prévu. Toutefois, l'employeur doit remettre au salarié un certificat de travail, une attestation ASSEDIC et un solde de tout compte.

Les indemnités de rupture
Une indemnité de fin de contrat
Si à la fin du CDD, les relations contractuelles de travail ne se poursuivent pas par un CDI, le salarié a droit à une indemnité, venant s’ajouter à sa dernière paie, destinée à compenser la précarité de sa situation. Cette indemnité est égale à 10% de la rémunération brute perçue par le salarié pendant toute la durée du CDD (C. trav., art. L. 122-3-4).
Toutefois, cette indemnité n'est pas due à la fin:
- d'un CDD saisonnier;
- d'un CDD d’usage;
- d'un CDD conclu dans le cadre de la politique de l’emploi;
- d'un CDD conclu avec un jeune pendant la période des vacances scolaires.

De même, cette indemnité n’est pas due :
- en cas de rupture anticipée du CDD pour faute grave du salarié ou pour force majeure;
- si à l’issue du CDD, le salarié refuse la conclusion d’un CDI pour occuper le même emploi ou un emploi similaire, assorti d’une rémunération équivalente;
- si à l’issue du CDD, les relations contractuelles se poursuivent en CDI.

Une indemnité compensatrice de congés payés
Le salarié en CDD a droit à des congés payés quelque soit la durée de son contrat de travail (donc même si cette durée est inférieure à un mois). Dès lors, s'il ne prend pas son congé pendant son CDD, l'employeur doit lui verser une indemnité compensatrice de congés payés. Cette indemnité ne peut être inférieure au dixième de son traitement brut total.

La poursuite du travail au-delà de l’échéance fixée
Si les relations contractuelles se poursuivent au-delà du terme fixé dans le CDD, ce dernier se transforme en CDI, sauf dans les cas suivants :
- renouvellement d’un CDD à terme précis dans les conditions légales
- succession de CDD dans les cas autorisés par la loi
- contrat de qualification

Important: Si le CDI suit immédiatement le CDD, le salarié conserve l’ancienneté qu’il a acquise au titre du CDD. Par ailleurs, la durée du CDD est déduite de la période d’essai éventuellement prévue dans le CDI.

Gwendoline AUBOURG
DEA de droit social